Punition et récompense, bâton ou carotte…? Les recettes d’antan sont-elles encore efficaces aujourd’hui? Quand je punis mon enfant, a t-il compris le message? Et quand il adopte un comportement exemplaire, puis-je le récompenser pour l’inviter à continuer sur cette voie?
Si la carotte et le bâton peuvent fonctionner sur le moment, nous avons aujourd’hui le recul nécessaire et des outils comme les neurosciences nous permettant d’affirmer que « l’éducation dans un cadre punitif et répressif a des effets dommageables sur le développement du cerveau« , comme l’explique Béatrice Sabaté, psychologue clinicienne, dans l’émission « La Maison des Maternelles », diffusée sur France 5 le 11 octobre 2019.
- Pourquoi aller au coin nous emmène dans le mur
Si la punition peut marquer un temps d’arrêt, elle engendre quatre conséquences possibles comme effet boomerang à long terme : la rébellion, le retrait, le ressentiment, la revanche. C’est ce qu’ont expérimenté les parents de mes Ateliers lorsqu’ils ont dû plonger dans leur enfance pour se remémorer un souvenir de punition. En nous mettant dans la peau de nos enfants, nous découvrons émotionnellement ce qui se passe pour eux. C’est là que se font les déclics pour changer nos habitudes éducatives.
Isoler l’enfant lorsqu’il fait une colère ou s’oppose avant quatre ans est contre-productif car ne sachant pas gérer ses émotions seul, il va s’empêtrer dans sa tempête émotionnelle, dont il sortira avec encore plus de colère, de l’inquiétude, et l’angoisse que cela se reproduise. Et cela se reproduira car ses émotions le submergent jour après jour. Le mettre au coin est une humiliation car en général le coin est visible de tous. Non seulement il est seul mais tout le monde le regarde. Comment sortir grandi d’une telle situation?
A partir de sept ans, l’enfant peut faire preuve de réflexion et l’isoler dans sa chambre peut être une solution, mais tout dépend comment cela lui est proposé. Encore une fois, l’objectif est de le faire grandir, apprendre, comprendre et pour cela il faut l’aider.
Si votre enfant vous sort par les yeux et que sur le coup de la colère vous avez envie de le priver de dessert, de dessins-animés, de téléphone… jusqu’à la fin de sa vie, il est temps pour VOUS de vous isoler et d’aller réfléchir à ce qui pourrait être constructif pour tout un chacun. S’isoler soi-même est souvent bien plus utile! Car quand vous reviendrez après un temps pour vous (douche, dîner, arrosage de plantes, carré de chocolat…), votre visage et votre état d’esprit ne seront plus les mêmes et, par effet miroir, l’enfant pourra redescendre.
- On marche à la carotte, en plus ça rend aimable!
La carotte, la récompense, font beaucoup de bien sur le moment. Les parents soucieux de participer à la confiance et l’estime de soi de leur enfant, désireux que celui-ci s’exécute, ont découvert qu’avec la carotte, l’enfant, – tout comme l’âne – avançait. Mais qu’apprend t-il par ce biais? S’il fait les choses pour l’image, le bon point, le bonbon, le temps d’écran, comment va t-il élaborer le sens de l’effort, la motivation, la curiosité…? J’ai maintes fois cité l’étude de Carole Dweck pour inviter les parents à encourager leurs enfants plutôt qu’à les complimenter, à louer leur sens de l’effort, leurs progrès, leur apprendre à s’auto-évaluer, à décrire ce qu’il ont réalisé plutôt qu’à le sur-valoriser, à leur apprendre à être fiers d’eux-mêmes et non à rendre fiers leurs parents. Toute la différence est là.
La carotte fait avancer l’enfant, il sera bien coiffé et dans les temps, mais n’aura pas eu le loisir de réfléchir aux raisons qui le poussent à agir ainsi, n’aura pas eu besoin de faire preuve de créativité, d’imagination, d’innovation. Il aura été un parfait exécutant, prêt à refaire indéfiniment le même parcours tant que la carotte l’attend au bout.
La carotte vous rend service à vous, mais pas à eux. Il n’est pour autant pas du tout compliqué de sortir de ce cercle que l’on croyait vertueux, c’est un changement d’habitudes, de réflexions à leur encontre. Cela se fait petit à petit, c’est une gymnastique essentielle pour leur construction et leur confiance en eux. Cela passe par la façon dont vous allez poser les yeux sur eux, en les invitant à faire pour eux-mêmes et non plus pour les autres. Cela vous permettra de sortir de « qu’est-ce que tu me donnes en échange? » que vous avez instauré sans le vouloir.
Les outils existent, ils passent par un changement de regard sur votre enfant. En le comprenant mieux, vous réussirez à le faire grandir dans un cadre ferme, bienveillant et encourageant.
Regardez Les Ateliers Parents dans l’émission la Maison des Maternelles, diffusée sur France 5 vendredi 11 octobre 2019
Julie Renauld Millet, coach parental